Retrouvailles difficiles

avec Irina Nieminem

irina NIEMINEM

Après une année en Angleterre, où il a dansé à Covent Garsen, le jeune danseur Erik

Anderson, retrouve, à Copenhague, un professeur de danse qui l'a durement formé.

La rencontre est houleuse.  Pour Irina, la carrière d'eRik

ne se joue pas au Danemark...

 Cette rencontre avec Hannah Hermann, le professeur de danse de ses jeunes années le laissa radieux. Il était admiré et c'était bon ! Des jours durant, il resta joyeux. Pourtant, quand Irina Nieminen, la femme qui l'avait, deux ans durant, durement formé, prit contact ace lui, il sut qu'il n'en irait pas de même et que sa gaité s'en irait. A son arrivée à Copenhague, il l'avait appelée sans succés. Elle était, semblait-il, quelque part au Danemark, mais injoignable. Connaissant sa nature hautaine, il s'en était, en fin de compte, réjoui. Puis, elle avait rejoint la capitale danoise, su qu'il était de retour et l'avait contacté. Il ne pouvait la contourner.  Sans elle, il le savait, jamais il n'aurait  jamais acquis un tel rayonnement. Le Russe qui lui avait donné des cours en même temps qu'elle y était aussi pour quelque chose mais c'était à elle qu'il était redevable de son succès. Il lui devait sa brillante admission au Ballet royal du Danemark et ses débuts fracassants. Il lui devait aussi son passage en Angleterre et son ambition...

Elle l’invita dans un restaurant chinois. Il la trouva  d'abord souriante puis acerbe.

- Vous êtes  radieux  n'est-ce pas ? Un triomphe en Angleterre et ce retour au pays !

- Évidemment que je suis radieux !

- Soyez prudent ! Ne commencez pas à vous comporter comme un de ces mondains que vous avez dû si souvent rencontrer. Allez-vous en rester là ? Aurez-vous le courage de faire le chemin qui vous reste ? Vous pouvez être engagé sur des scènes internationales comme  danseur étoile. Allez-vous-en !

- Qu'est – ce à dire ?

- Quand je vous ai formé, j'ai su. Vous n'avez pas une trajectoire banale ou plus exactement, une trajectoire peu banale vous attend, si vous consentez à l'accepter !

Irina, qu'il trouvait vieillie, portait un tailleur rouge-foncé et un étrange petit chapeau. Elle était bien maquillée et coiffée mais Il ne lui trouvait plus la superbe des premiers temps.  

-Je suis jeune, ambitieux. Je ne comprends pas. Pourquoi ne pas me laisser danser au Danemark ?

Irina eut un rire déplacé.

- Si vous restez ici, vous représenterez le Ballet royal danois à l'étranger et considérerez que tout va très bien. Articles élogieux, célébrité locale, argent. Et parfois  un  discours de fin d'année dans une  école de danse...

- Quoi ? Vous êtes invraisemblable ! Hannah m’a invité !

- Et vous faites votre petit garçon sage ! Mais sage, vous ne l'êtes pas ! Vous ne savez encore rien ! Ces choses-là ne sont pas simples, on souffre beaucoup ! Acceptez, vous verrez. Vous deviendrez « grand ». On ne le saura pas tout le temps de vous  et on sera très dur parfois. Je voudrais que vous acceptiez cette éventualité : vous vous croyez déchu et vous êtes grand. La neige et la boue ! Monsieur Anderson, prenez une décision ! La neige et la boue !

- Pourquoi êtes-si impérative ?

- Décidez maintenant !

- Madame, vous parlez fort, vous me parlez mal !

- Et vous, jeune idiot, vous êtes sourd !

On se retourna sur eux dans le restaurant et il fut mal à l'aise. Elle se mit à parler finlandais très vite et très fort et il eut peur pour elle. Puis, elle cria :

- Clown !

Il rougit.

Elle fut prise d'un grand éclat de rire et il fit signe au serveur pour l'addition. Dans le taxi qu'ils prirent pour la raccompagner, elle fut mutique. Elle semblait très énervée. Il tint à la réinstaller dans son appartement et le trouva rassurant : les mêmes meubles, les mêmes livres et le mur d'images : ces compositeurs, ces chorégraphes, ces danseurs et ces célébrités qu'elle avait côtoyées. Il restait des toiles qu'il connaissait et il découvrit de nouveaux tableaux. Il conduisit Irina à sa chambre qui était devenue monacale : petit lit blanc, murs blancs, petit chevet avec lampe, plafonnier et icônes de la Vierge au mur. Quand il l'eut allongée, il se crut délivré mais elle lui prit les mains et le serra violemment. Elle cria presque :

- Pas clown longtemps ! Génie ! Génie !

Il mit longtemps à libérer ses mains.

Les jours suivants, il fut mal à l'aise. Elle était en détresse et aurait peut-être souhaité qu'il revienne la voir mais il ne le fit pas.

 Elle avait été provocante. Il coupa les ponts. Il n'en fit pas moins ce qu'elle disait puisqu'au fil du temps, le Danemark lui parut bien étroit. Quand l'opportunité se présenta de faire une carrière américaine, il saisit sa chance. Vexée elle-aussi, elle ne lui fit rien savoir de son contentement. Mais, assurément, elle était satisfaite. Il s'envolait...Elle avait toujours vu juste avec les danseurs et celui-là avait une forme de génie. Au New York City ballet, on s'en rendrait compte tout de suite. Elle ne douta pas un instant qu'Erik trouverait le moyen d'y travailler car elle le savait tenace et adroit. Profitant de l'arrivée au Ballet royal du Danemark d'un nouveau directeur artistique qui avait été formé avec Peter Martins et était resté très ami avec lui, il profita d'une magnifique opportunité. Martins, qui était de passage à Copenhague, le vit sur scène et fut admiratif. Il était, après tout, directeur artistique du New York City ballet et savait reconnaître le talent et la singularité. Un contrat de travail d'un an fut proposé à Erik. Il n'y avait pas à réfléchir. Juste à signer. New York. Une des plus grandes compagnies de danse du monde allait l'accueillir. Dans l'ombre, Irina souriait...