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Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
15 avril 2024

Erik N / Le danseur. Partie 2. Se sentir vide.

 

Une image lui revint : il venait d’arriver à New York et il était allongé nu auprès de son ami, qui lui, était vêtu. Le sourire de Julian était léger mais le désir entre eux était d’une force immense. Ils se guettaient et s’attendaient. Erik pensa à un texte qu’il aimait : « Dire qu'il est beau décide qu'il le sera. Reste à le prouver. S'en chargent les images, c'est-à-dire les correspondances avec les magnificences du monde physique. L'acte est beau s'il provoque et dans notre gorge fait découvrir le chant. Quelquefois la conscience avec laquelle nous aurons pensé un acte réputé vil, la puissance d'expression qui doit le signifier, force au chant. » C'était Jean Genet. Julian connaissait ces phrases lui-aussi.

Les jours suivants, il se sentit totalement vide. Il ne pouvait parler à quiconque : qui aurait compris ? Le silence peut être assourdissant et pendant cette période, il le fut. Le jour, il travaillait plus que de mesure pour ne pas penser.  Le soir, il se préparait pour aller la représentation qu’il devait assurer et entrait en scène. La nuit, il se réveillait en sursaut et vomissait.

Il commençait à moins souffrir de cette vengeance cynique quand, sortant du théâtre un soir, quelques semaines après l’écœurant dénouement de sa rapide liaison, il appela Julian.

-Il faut qu’on parle.

-Pas maintenant.

-Quand ?

-Après-demain. Central Park. Cet endroit que nous aimions…Quinze heures. Tu peux ?

-Je viendrai.

Julian était déjà assis sur un banc à l’endroit indiqué quand il le rejoignit.

-Bonjour Erik.

-Bonjour.

-On ne va perdre de temps, n’est-ce pas ? Clive et Tom ! Tu as dû aimer le scénario ! La rencontre fortuite qui n’en est pas une, c’est bien trouvé, non ?  Et eux, ils t’ont convenu ? Avoue que ces deux types-là, ça vaut la peine !

Comme Erik ne disait rien, Julian éprouva une joie secrète car son jeune amant avait l’air abattu, et poursuivit :

-Rien à dire ?

-Si, c’était bien trouvé. Tu les connais depuis longtemps ?

-Je connais surtout Clive.

-Comment m’a-t-il reconnu ? Tu lui as montré des photos de moi ? Tu lui as donné des renseignements ?

-Oui.

-Il est réellement marié ? Il a réellement une fille ?

-Oui, ça c’est vrai ; et sa fille qui fait de la danse classique, c’est vrai aussi.

-Le studio est à toi ?

-Bien sûr que non !

-A qui est-il ?

-Là, je ne te répondrai pas.

-Tu les as vus ensuite et ils t’ont raconté…

-Oui mais sans entrer dans les détails.

-Je ne te crois pas. Clive a dû être très bavard.

-Il l’a été mais pas tant que cela. C’est un drôle de type, un profiteur.

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