Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
28 mars 2024

Erik N / Le Danseur. Partie 3. Kyra Nijinsky. Souvenirs d'enfance.

 

Bébé, on lui avait dit qu'elle changeait, devenait confiante quand son père entrait dans la nursery. Elle faisait partie de lui. Et il était comme elle. On lui avait dit cela, et pas seulement sa mère. Elle parlait, elle parlait et elle montrait les photos. Des amies à elle avant, des photos d'elle dans différentes capitales, son père.

-Vous avez aussi écrit des poèmes ?

-Des textes ésotériques, oui. Dans la vie, je parlais de la Suisse où mon père avait été malade, de Berlin, de l'Angleterre et de Rome. Je parlais aussi de l'Italie, après mon divorce. Tout ceci était, comme vous pouvez l'imaginer, difficile. S'en prendre aux symboles et à l'au-delà peut être une façon d'affronter les « Forces de la Vie autant que celles de la Mort ». C'est pourquoi j'ai choisi d'écrire dans cette veine...

Elle ne disait toujours rien de ce qu'Irina avait écrit et il pensa que c'était peut-être juste une lettre d'introduction. Cependant, il y avait deux heures qu'il était avec elle et comme l'heure du déjeuner arrivait, il supposa qu'elle voulait prendre congé mais elle l'étonna beaucoup.

-Vous avez du temps libre, n'est-ce pas ? Alors, venez chez moi. Je vais vous montrer des photos, des textes...

Il parut stupéfait puis se souvint des consignes d'Irina : « ne lui demandez pas de se justifier et ne posez jamais deux fois la même question ! Ne l'interrompez pas. Placez vos demandes à bon escient et regardez-là. Elle vous regardera aussi même si vous en doutez et en aura appris sur vous. Quant au film, il existe. Ne le laissez pas en arrière sous couvert qu'elle vous intimide. »

-Bien. En ce cas, je vous conduis.

Elle avait un étrange regard fixe et regardait par terre puis elle le fixa et dit « oui ». L'instant d’après, elle s'était levée et il était touché. Elle n'était pas si grande. Elle portait une grande blouse sombre, une jupe longue. Il n'était pas difficile de voir qu'elle avait un buste très fort, qui avait dû étouffer sa féminité. Ce buste, ce grand visage, ce cou fort, ces grands yeux. Nijinsky. Erik sentait que jamais plus il ne vivrait cela. Cette rencontre avec cette femme secrète et, impressionnante qu'il reconduisait chez elle ! En chemin, il reprit les thèmes des fleurs :

-Elles sont fanées…Je vais en acheter d’autres …

-Je les garderai, même fanées.

-C'est une belle réponse.

 Elle avait longtemps habité Los Angeles mais résidait maintenant à San Rafael. Elle vivait dans une maison de petites dimensions qui était claire et bien aérée. Elle était seule mais prise en charge. Manifestement, on lui faisait les courses, le ménage. Rien n'était négligé ou à l'abandon. Dans le salon, où elle le reçut, elle le laissa seul pour mettre dans des vases toutes les fleurs qu'il lui avait offertes et cela prit un peu de temps.

-Prenez place, voyons !

 C'était un décor un peu standardisé, avec un grand canapé, des fauteuils confortables, une table pour recevoir la famille et une grande bibliothèque, d'autres petites tables. Il ne voyait là qu'un intérieur américain, somme toute banal mais un regard plus attentif montrait qu'elle était européenne et raffinée. Les rideaux, la teinte des murs, les grandes lampes qu'elle avait choisies et l'absence d'excès, de surcharge. Elle avait sur une sorte de dressoir, accumulé les photos de famille et celles qui ne pouvaient tenir sur le meuble, étaient encadrées. Il vit son père et sa mère très jeunes d'abord puis déjà d'un certain âge. Ils étaient tantôt ensemble, tantôt séparés. La première photo était celle du mariage. Romola, vêtue d'un tailleur blanc, portait dans ses mains un long bouquet. Elle regardait le photographe mais son visage n'était pas très visible.

Publicité
Publicité
Commentaires
Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
Publicité
Archives
Derniers commentaires
Publicité