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Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
17 février 2024

Erik N/ Le Danseur. Partie 4. Williamson retrouvé. Photos.

ROTHKO

Williamson voulait le photographier encore. Il le fit dans le patio de l’hôtel puis dans sa suite. Assis, debout, de face, de trois quarts, vêtu, dévêtu. Erik, habillé, paraissait aérien, presque mystérieux. Nu, il était troublant et vulnérable. Rob passa ensuite au portrait en noir et blanc. Mobile et changeant, le visage du danseur paraissait contenir d'autres visages, tous fragmentaires, tout aussi bien, ceux des héros qu'il avait dansés que ceux qu'il incarnait dans le film…

Lors d’une pause, Rob lui dit :

-Les photos sont des jalons et se laisser voir par autrui est aussi important que se rencontrer soi-même par l'intermédiaire d'un vrai photographe ; j'espère en être un. Promettez-moi que vous y songerez.

-J’y songe déjà.

- « Le visage est présent dans son refus d’être contenu. Dans ce sens il ne saurait être compris, c’est-à-dire englobé. Ni vu, ni touché. »

-De qui est-ce ?

-Un philosophe français contemporain. Cherchez.

C’était fini. Ils burent du champagne. Rob fut direct :

-Vous voulez partir maintenant ?

-Non.

-Ce « non » est engageant…

-Il l’est…

Rob voulait faire l’amour et le danseur accepta.

-Cette fois, on va jusqu’au bout, hein ? Tu ne me fausses pas compagnie, comme l’autre fois.

-Je suis là.

-Et tu ne me parles comme si j’étais une lointaine sommité.

-Non, je serai plus simple.

-Et ensuite, attendu que je séjourne à New York, tu ne t’envoles pas. Tu restes disponible.

-Je travaille beaucoup mais ça devrait aller.

Quand les mains de Rob se posèrent sur lui, Erik se sentit comme délivré. Le photographe le pénétra alors qu’il était de dos. Il sentit son haleine contre son cou. La prise était délicieuse. La jouissance le fut aussi.

-Hum, Erik, au plaisir de recommencer quand tu veux…

-Dans une heure ou deux par exemple.

-Je serais assez d’accord.

Rob, qui était penché sur lui, souriait. Il se pencha pour l’embrasser longuement sur la bouche.

-Ce n’est pas moi qui gagne, hélas ! C’est lui…

-Pas pour le moment.

-Oh, très bien ! On se revoit.

-Oui, je reviendrai.

Et Erik enlaça Rob.

Chloe ne faisait même pas partie de l’équation : elle perdait. L’avantage était à Julian. Erik le choisissait mais ne comptait pas se déclarer. Il laisserait cet amour affleurer et il verrait.

Rob et lui se virent plusieurs fois. Le photographe était ardent et tendre mais la perte de son compagnon tant aimé l’avait comme brûlé.

-Tu es un être d’amour, Erik, moi, je ne le suis plus.

-Tu es tendre.

-Oui, mais ça ne dure pas. Pour moi, plus rien ne dure, sauf les photos que je fais…

Les mois filèrent. De nouvelles photos de Rob furent acquises mais comme les précédentes, Erik les tint cachées. Chloé, qui avait finalement vu l’intégrale des premières photos, avait été déroutée : Erik y était parfois aussi lointain et insaisissable que le faune. Williamson les avait dispersées dans divers albums. La seconde série risquait de la confronter plus encore à des questions sans réponse. Cet homme jeune, tantôt hiératique, tantôt provoquant n’entrait pas dans les habituelles classifications de la virilité et de la féminité. Que pouvait-elle attendre ? Ses doutes se multipliaient puis il arrivait, la prenait dans ses bras et ils discutaient de mille choses…

 

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