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Moi, je sais d'où souffle le vent. Ecrits sur la danse.
12 mars 2024

Erik N/ LE Danseur. Partie 3 . Erik hanté par Nijinsky.

 

Erik lui tendit quelques feuillets qu’ils conservaient sur lui. Kyra lut en silence :

 

 

« Ce que je tourne »

par Erik Anderson

Scènes difficiles :

 

Scène 1.

Je figure Nijinsky qui ne comprend pas la réaction de Diaghilev suite à l'annonce de son mariage avec Romola. Il pensait que l’impresario comprendrait mais celui-ci le limoge immédiatement. C’est une scène muette tout en violence. Mon visage doit exprimer des émotions intenses, allant de l'incrédulité à l'abattement et au désespoir. Le travail est intérieur. Pas de paroles et une gestuelle réduite. Les larmes doivent affleurer. Le texte en voix off s'ajoutera ensuite. Dominantes rouge orangé.

 

Scène 2.

J’incarne Nijinsky qui est à Londres et pleure de l'humiliation reçue. Il est malade et épuisé. Scènes muettes comme précédemment. Il y aura surexposition de photos du danseur et de moi-même. Dominante bleu et gris. Il faut dire qu’il a tenté de percer en Angleterre après son départ des Ballets russes mais qu’il s’est fourvoyé. A l’Opera de Paris, on lui proposait un poste important. En Grande Bretagne, il ne vaut pas mieux qu’un artiste de cirque. Il est horrifié.

 

Scène 3 :

 Nijinsky est aux États-Unis. C'est la deuxième tournée. Il n'arrive pas à gérer la troupe et sent son échec. Je figure un jeune homme qui souffre trop de blessures restées ouvertes : l'éviction brutale des Ballets russes, la terrible rancœur de Diaghilev et l'approche d'une violente dépression ; L'appréhension de sa maladie mentale à venir peut-être. Et la conscience qu'il a d'être un génie tandis que personne ou presque ne s’en rend compte. Il est agité, se ronge les ongles au sang. Il commence à pleurer puis se met à hurler. Il se tape la tête contre les murs. Dominante verte.

 

Scène 4.

Il y a encore un contrat et il doit aller en Amérique du sud mais il en a assez. Souhaitant voler de ses propres ailes, Il part avec sa femme. Diaghilev le fait arrêter dans un train en Espagne et il est tenu de danser de nouveau pour lui. Il rejoint le Nouveau monde. Jamais plus, il ne dansera. Mon visage doit exprimer une souffrance qui devient pathologique. La maladie va s'installer. Le gris et le noir dominent.

 

 

 

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12 mars 2024

Erik N/ Le Danseur. Partie 3. Erik et le Danseur russe.

  1. Notes sur les carnets de Kyra Nijinsky.

Erik Anderson.

 

Le carnet traduit présente des textes d'elle et des textes recopiés ; les dessins sont antérieurs aux écrits et ont une grande valeur. Ce sont des essais de Bakst pour différents ballets encore qu'il existe d'autres dessins dont l'un est sans nul doute de son père. Il est commenté et l'écriture de Nijinsky semble certaine. On la retrouve dans plusieurs cas. Le texte lui, n'a pas de valeur marchande mais pour le film, il est un document important. Kyra procède par notations : son enfance cosmopolite, son père adoré jusqu'à l'obsession, la relation ambivalente qu'elle a eue avec sa mère, sa vie à Paris, à Londres, à Budapest, en Suisse. Sa carrière de danseuse. Et bien sûr, des remarques sur son mariage, son époux, son fils. Il y a aussi toutes sortes de remarques sur la danse, les arts graphiques, la musique. Noter qu'elle est souvent très inquiète sur elle-même. Elle semble soucieuse de raconter sa propre trajectoire de danseuse et on sent bien que ses années d'apprentissage n'ont pas fait d'elle une grande interprète ; peut-être une bonne exécutante. Elle n'est pas stupide et a, très vite, rencontré ses limites.

 

Tenir compte de son extrême intelligence. Quand elle parle de la danse, jamais elle ne se trompe. Elle connaît les bases et la lenteur de l'accomplissement. Elle a rencontré la Grâce en son père et peut en parler. Elle cite des figures. Elle parle de l'aptitude au saut de Nijinsky, de son « ballon ». Elle écrit très bien dans ces moments -là.

 

Tenir compte de ce qu'elle a dû accepter : ce père immense et malade, la légende qui l'a entouré, ce qu'on a pu espérer d'elle et ce qu'elle a pu donner.

Noter : cosmopolitisme. Elle le copie : il allait d'un pays à un autre et vivait dans des hôtels ou des pensions. Son père ne parlait au début que polonais et russe. Il a appris le français. Romola, son épouse bien née, parlaient plusieurs langues. Kyra passera d’une langue à une autre…

12 mars 2024

Erik N / Le Danseur. Partie 3. Kyra et les écrits d'Erik.

 

Parallèles :

Si j'en reviens à moi, je pense à mon adolescence et au Ballet royal danois. J'ai été très remarqué dès mon entrée et j'ai senti du dépit autour de moi. J’ai côtoyé au début des danseurs qui s'estimaient meilleurs que moi et ne me prenaient pas en considération mais j'ai vu ces mêmes danseurs pâlir. J’avais de très bonnes aptitudes mais ils les avaient aussi. On m’a donné des rôles qui auraient pu leur revenir. On parlait de mon charisme, de ma grâce. J’étais audacieux, aussi. Je me souviens d'un danseur blessé : on venait de lui retirer son rôle pour me le donner. Avoir un don met dans une position difficile. Il vous situe entre adoration et rejet. Il fait de vous un être dont on espère toujours qu'il décevra... J’ai reçu le regard des autres à Copenhague : Pourquoi toi ? Et à Londres, à New York aussi, je le sais, on m'en a voulu. Ceux qui étaient autour de moi dansaient parfaitement ; ils étaient légers et vifs, souples, contrôlés, composés. Mais « j’exploitais une force différente, intangible. C’était au-delà de la pensée, un élan violent et spirituel. » J’ai lu cela sur moi. Je ne l’aurais pas dit ainsi mais c’est vrai.  Je fais naître le bonheur mais aussi la frustration…

Cette frustration, Kyra l'a éprouvée d'autant plus durement que son père était Nijinsky. J’admire son courage. Elle a dansé tout de même, malgré et pour ce père dont tous connaissaient le nom. Et si moi, Erik, peux me targuer d'avoir reçu un don pour la danse, il ne lui est pas échu cette chance...

J'adore ce carnet : il est plein de textes mystiques, de petits poèmes et des textes recopiés : citations diverses et propos de son père. C'est un tout extravagant. Mais elle est là tout entière, Kyra et il faut considérer la lecture de ses écrits comme une offrande qu'elle fait d'elle-même et comme une clé qu'elle donne pour accéder au rêve de son père.

Son écriture est appliquée : grande et naïve. C’est un texte bien plus élaboré qu’il n'y paraît et beaucoup le critiqueront mais moi, je l'aime ;

Défendre. Insister. Admirer sans condition. »

 

Elle replia les feuillets et regarda fixement Erik. Massive, maladroite, hautaine, elle souriait malgré tout et ses grands yeux verts montraient la joie.

-Ce n’est pas approximatif, comme vous le pensez.

Elle était bien trop intelligente pour ne pas comprendre que son art faisait d’Erik un être singulier à qui il serait demandé beaucoup et elle lui renvoya avec douceur sa propre solitude.

-Le succès ne fait pas que tout est facile, n’est-ce pas ?

-Non, madame.

-Vous avez rencontré la Grâce, vous le savez ? C’est là chose exceptionnelle. Irina savait, cet Oleg aussi. Et moi, Kyra, maintenant je le découvre.

Il avait les larmes aux yeux.

-Soyez gentil : récitez ce grand monologue que je n’ai vu qu’en partie ; celui où vous récitez tous ces textes de mon père.

-Ici, dans ce restaurant ?

-Oui.

Il recula sa chaise et commença :

« La plupart des gens qui me connaissaient pensaient que j’étais incapable de m'intégrer socialement... »

12 mars 2024

Erik N / Le Danseur. Partie 3. Kyra Nijinsky et Erik sur le tournage.

  1.  
  2. Kyra le scrutait. Le texte de déroulait. Nijinsky ! Le petit Polonais que sa mère avait inscrit à l'Ecole impériale où l’on se moquait de lui avant de le jalouser et de l’admirer ! Le danseur prodigieux qui, issu d'une école prestigieuse travaillait au théâtre Mariinsky ! La ruse d’un imprésario audacieux pour l’en déloger et en faire l'étoile des Ballets russes ! Et la folie après le désespoir. C’était violent. Les traits du visage, pourtant si nordiques, paraissaient presque slaves à cette auditrice, comme si se faisait une étrange osmose entre ce que ce danseur était et celui dont il se rapprochait. Quand il eut terminé, elle fut partagée entre la confusion et l'admiration puis elle reprit :-Écoutez -moi : vous vous approchez de Nijinsky. Il ne se dérobe pas, ne croyez pas cela. Bientôt, vous vous détacherez de lui. Si vous ne le faites pas, votre visage du danseur sera semblable à un de ces masques antiques que l’on peut contempler dans les musées italiens. Le teint cireux, les grands yeux exaltés et les lèvres redessinées. Non, vous allez vous éloigner de ce film car allez devoir le porter. Sur l’écran, les spectateurs verront un visage d'Erik qui reflète parfois une tristesse violente puis qui affiche une grande joie. Vous serez désinvolte puis accablé puis enfantin puis très blessé. Vos expressions seront changeantes et votre phrasé aussi. Vous jouerez beaucoup de ses mains. Vous serez maladroit puis gracieux dans vos attitudes. Vous renverrez le spectateur à Nijinsky et vous le ferez avec une grande habileté et une grande humanité. Mais vous serez aussi celui qui représente le film et là, vous aurez pris vos distances. Ils vous croiront, ils vous aimeront ; et ils découvriront ce danseur encore anonyme qu'un don extraordinaire traversait et qui illuminait brièvement les scènes internationales et cet abandon...cette effronterie et cette naïveté ; ce génie...Ils sauront son enfance à Saint-Pétersbourg, la pauvreté, le désir des femmes, la danse, la danse, l'amant non voulu qui remplaçait l'amant adoré mais offrait les Ballets russes, l’idolâtrie, le succès. Il disait le mariage, la dureté, la volonté de créer, le génie. Et à la fin, l'emprise de la maladie.

  3. -Et la danse.

    -Surtout la danse !

    -J’espère que vous viendrez aux premières !

    -Nous n’en sommes pas là.

    Mi-rieuse mi-alarmée, elle se mit répondit en russe et il ne comprit rien ; puis elle rit et demanda un dessert.

    Il la raccompagna comme la veille et la vit encore le lendemain. Il tenait à la saluer. Elle fouilla dans une valise dans sa chambre d’hôtel et lui tendit une enveloppe.

    -Tenez.

    La première photo était celle du jeune spectre enrubanné. Elle n'était pas connue et moins belle que celle, où, radieux, Nijinsky posait avec Karsavina mais elle était inconnue de tous. Là, il était seul mais la posture était belle et le visage gardait la même intensité. La seconde était celle du joueur de tennis de Jeux. Dans les deux cas, c’était des documents exceptionnels.

    -Je dois vous redonner le carnet. Et je vous retournerai ces photos.

    -Pourquoi ?

    -Mademoiselle Nijinsky…

    -Kyra.

    -Kyra : ces documents sont inestimables. Je n’en suis pas digne.

    -Je pense que si. Appelez Irina et informez-vous auprès d’elle : elle dira de même. Je ne me demande pas combien de lectures vous avez dû faire, combien de photos de Nijinsky et des danseurs des Ballets russes vous avez dû contempler, avec combien de spécialistes vous avez pu échanger : si c’était le cas, je ne vous aurais rien donné !  Il ne vous parlait pas, vous lui avez parlé : il s’est tourné vers vous.

    Mills et plusieurs danseurs rejoignirent Erik et restèrent avec Kyra et lui jusqu’au transfert de celle-ci à l’aéroport. Un certain émerveillement régnait. Une fois seuls, le metteur en scène lui dit :

    -Eh bien, Erik ! Tu as magnifiquement su lui parler !

    Wegwood acquiesça mais il fut moins enthousiaste. Il se serait attendu à un engouement plus grand pour ses chorégraphies de la part de la fille du grand danseur ; or, c’était Erik qui recueillait tous les suffrages. Celui-ci ne confia à personne que Kyra venait de lui donner des photos pour lesquelles on lui offrirait, si on savait qu’il les avait, des sommes indécentes. Il en parlerait peut-être à Julian.

  4.  

 

 

 

12 mars 2024

Erik N / Le Danseur. Partie 3. Erik et Chloé.

8. Fin de tournage et délivrance.

On tourna encore mais Erik avait fait sa part. Il eut plus de temps à consacrer à Chloé. Celle-ci était songeuse. Elle avait compris, à force de questionner le danseur, quels étaient les enjeux du film qu’il tournait et quand elle les avait eu mesurés, elle s’était sentie exclue. Elle était une artiste, elle-aussi mais son univers était le dessin et la peinture. Elle s’agaçait de ne pas avoir réussi le dernier portrait qu’elle voulait faire d’Erik en costume de « Jeux ». Il lui semblait singer les affiches qu’elle avait vues. Elle ne réussit que quand elle isola le personnage du jeune joueur de tennis. Il était aux aguets, frémissant et beau. Quand il vit ce qu’elle avait fait, il fut ravi :

-C’est parfait ?

-Mais oui, ma chérie !

Elle parut doublement contente car elle lui annonça que ses dessins étaient jugés bons.

-Julian Barney, celui à qui tu m’as dit de m’adresser, les a regardés et m’a répondu. Il me dit de poser ma candidature et cite plusieurs écoles. Je suis en train de faire mes demandes et de faire le nécessaire pour avoir une bourse.

-Tu vois, c’est bien !

-Il es snob, ce type, on dirait.

-Oui, il l’est ; mais il est très cultivé.

-Tu le connais bien ?

-Oui.

-Vous êtes amis alors ; vous vous êtes appelés pendant ton tournage. Il y a quelques jours encore.

-Oui, nous sommes liés.

Elle était perplexe ; pouvait-elle se fier à quelqu’un comme Erik ? Elle était folle de lui et il paraissait l’être d’elle mais qu’en serait-il à New York ? Tout de même, elle était heureuse ce ces quelques jours où ils étaient sans cesse ensemble. Une après-midi, il fut particulièrement ardent. Il la pénétra deux fois de suite. Elle était exigeante et prit son temps pour jouir. Il fut patient. Elle lui dit des mots d’amour et il lui en dit aussi. Puis elle pensa au beau faune ; il était pulsionnel. Le lendemain, alors qu’elle voulait le questionner, il fut caressant, la troubla et la dissuada de parler. Il la prit de manière classique puis quand il l’estima juste, il la fit se retourner et la sodomisa. Elle l’incitait à cette pratique depuis quelques temps et il se pliait à ses désirs. Le fait est qu’il savait vraiment prendre une femme mais elle restait hésitante. Il était bisexuel mais évitait le sujet ?  Mais l’aimait-il ? Et si c’était le cas, que valait son amour pour une femme ? Plus lourd ou moins lourd que celui qu’il pouvait éprouver pour un homme ?

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